Le partenariat Europe-Afrique-Méditerranée
Le partenariat Europe-Afrique-Méditerrannée
Comment renforcer la relation historique entre l’Europe et l’Afrique, et faire en sorte que le développement des deux continents se fasse en osmose ? C’est la question qu’a posée Gilles Pargneaux, euro-député français issu du mouvement « En marche », dans sa présentation d’une conférence organisée en partenariat avec OCP Policy Center, au Parlement européen, à Bruxelles, le 4 septembre 2018.
Président-fondateur de la Fondation EuroMedA (Europe-Méditerranée-Afrique), créée en 2017, Gilles Pargneaux est revenu sur la nécessité pour l’Europe de repenser sa relation avec l’Afrique, en raison de l’essor démographique de cette dernière et de la présence affirmée de nouveaux partenaires, dont la Chine et les Etats-Unis. « La Méditerranée et le Maroc, en particulier, représentent la clé de voûte pour trouver des solutions autour de ce partenariat », a affirmé l’euro-député.
Un bilan sans complaisance
Un tableau sans complaisance de l’espace euro-méditerranéen a été brossé par Fathallah Ouallalou, ancien ministre des Finances du Maroc, ancien maire de Rabat et Senior Fellow à OCP Policy Center. « Un espace fracturé où l’on retrouve la symétrie Nord-Sud, avec un différentiel resté de 1 à 10 dans le PIB par habitant, a-t-il rappelé. La Méditerranée a perdu son rayonnement par rapport à l’Atlantique, en partie par manque de réformes au Sud et défaut de volontarisme au Nord. L’Europe a globalement tourné le dos à la Méditerranée, ce qui n’est pas une bonne chose pour elle. L’Afrique est, en effet, devenue un centre d’intérêt mondial, comme en témoigne le sommet Chine-Afrique et les visites de Theresa May et Angela Merkel sur le continent. »
La décennie écoulée (2008-18) a été marquée par des reculs, en raison de la crise économique traversée par l’Europe, notamment en Grèce, en Italie et au Portugal, d’une crise « existentielle » de l’Euro, et « l’oubli par l’Europe de ses engagements sur la paix, avec des interventions abusives en Syrie et en Libye qui ont eu des répercussions dans le Sahel ». Alors que le populisme a monté en Europe, les printemps arabes « sont devenus un hiver lugubre avec l’essor de ‘’Daesh’’ et de l’’'Etat islamique’’ », marqué par leur défaite sur le plan militaire.
Les pistes de la « coproduction » et du « co-développement »
Que faire ? L’intérêt a été clairement relancé pour l’Afrique, en raison du Plan Marshall évoqué par l’Allemagne, dans un contexte de crise des réfugiés. Au Sud, la possibilité existe de redonner une centralité à la question palestinienne. Face à la fragilité des Etats dont l’intégrité territoriale est menacée – Irak, Syrie, Liban – la question de l’absence du Maghreb reste en revanche posée.
Afin de rénover le partenariat Europe-Afrique, l’idée s’impose d’une coproduction industrielle, qui permettrait la réindustrialisation de l’Europe, avec un renforcement des chaînes de valeurs. Des partenariats triangulaires entre l’Europe, la Méditerranée et l’Afrique subsaharienne pourraient être facilités par le Maroc, en tant que pays relais.
D’autant, a souligné Mohamed Loulichki, ancien Représentant permanent du Maroc auprès des Nations unies et Senior Fellow à OCP Policy Center, que « la Méditerranée doit être envisagée comme un trait d’union plutôt qu’une frontière, avec une Afrique qui représente le tiers de la communauté internationale (54 pays) et qui représentera sur le plan démographique un quart de l’humanité ». En outre, a-t-il fait remarquer, l’Afrique est « ouverte à toutes les régions du monde, même si elle a un faible pour l’Europe pour des raisons historiques, économiques et même sentimentales, en raison de valeurs communes, d’un certain humanisme, d’un sentiment de solidarité et la quête de liberté ».
Autre trait majeur du lien entre l’Europe et l’Afrique : le fait que le continent « commence à se structurer autour d’une Union africaine qui prend l’Union européenne comme modèle et avec laquelle les relations se renforcent. Sur les questions de paix, l’assistance financière de l’UE à la formation, au transport de troupes et son soutien logistique à des opérations africaines de paix montre que l’Europe fait preuve de solidarité ». Conclusion : « Un co-développement assumé entre les deux continents pourrait servir de modèle pour le reste des pays africains ».